Livre : L'École à la croisée des chemins Imprimer Envoyer
Pédagogie Explicite - Livres
Écrit par Stevan Miljevic   
Dimanche, 17 Mars 2019 11:28

Panier

L'école à la croisée des chemins
Essai

Stevan Miljevic
Éditions L'Âge d'Homme
204 pages

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Synopsis

 

Le livre de Stevan Miljevic, intitulé L'École à la croisée des che­mins, porte un regard scientifique sur les principales controverses éducatives qui opposent aujourd'hui pédagogies « progressistes » et « traditionnelles ».

L'auteur commence par définir une authentique démarche scien­tifique : pour pouvoir bénéficier de cette étiquette, des mesures em­piriques sont effectivement nécessaires. À partir de là, il démontre que la plupart des techniques pédagogiques constructivistes ou pro­gressistes n'obtiennent pas les résultats escomptés et qu'elles ne sont tout simplement pas en adéquation avec l'architecture cognitive des élèves. Par la force des choses, elles ne peuvent générer que de faibles apprentissages. Cela ne signifie pas pour autant qu'il faille revenir à l'enseignement traditionnel. L'École à la croisée des chemins plaide plutôt pour une troisième voie, un « enseignement explicite » plébis­cité par de nombreuses études menées sur le terrain. Il s'agit d'une synthèse des meilleurs éléments de la tradition et du progrès, apte à concilier les exigences les plus hautes vis-à-vis des élèves et de leur fonctionnement cognitif.

Le livre s'attache ensuite à définir ce que sont les compétences comme la créativité, la résolution de problèmes ou l'esprit critique. Il démontre que celles-ci sont étroitement liées à l'acquisition de connaissances. Elles ne surviennent que lorsque les savoirs sont maî­trisés à un haut niveau qualitatif comme quantitatif. Connaissances et compétences ne s'opposent donc pas, les deuxièmes n'étant que le prolongement des premières. Si l'école veut faire acquérir des com­pétences, elle doit forcément mettre l'accent sur les connaissances.

Stevan Miljevic s'intéresse également à d'autres pratiques comme l'« apprendre à apprendre » ou l'interdisciplinarité. Il permet là aussi de démêler le vrai du faux : pour être porteuses, les pratiques inter­disciplinaires demandent une bonne maîtrise de chacun des diffé­rents domaines pris séparément. Si ce préalable n'est pas respecté, l'interdisciplinarité engendre plus de problèmes qu'autre chose. En­fin, on « apprend à apprendre » en acquérant des procédures de tra­vail claires et précises.

Il n'est pas rare d'entendre certains tenants de l'enseignement pro­gressiste dénoncer le caractère autoritaire et non démocratique de l'école traditionnelle ; le livre fait donc un petit survol historique des institutions éducatives des systèmes fasciste et soviétique. Il en res­sort que ce qui est aujourd'hui présenté comme la panacée démocra­tique était en fait largement utilisé par ces deux régimes : démocratie et pédagogie ne sont donc pas liées. Seuls les contenus d'apprentis­sage distinguent une école démocratique d'une institution totalitaire. Sur sa lancée, Stevan Miljevic démontre aussi qu'il n'est pas pos­sible de classer progressisme et conservatisme éducatif sur un axe gauche-droite. Ce clivage se retrouve pourtant au sein de l'ensemble des forces politiques d'aujourd'hui. Il note au contraire que les idéo­logies contribuent à répandre largement de fausses théories au sein de l'institution scolaire. En fait, pour développer une école de qualité, une seule méthode doit être de mise : le pragmatisme.

La numérisation de l'école est, elle aussi, examinée. Études à l'ap­pui, L'École à la croisée des chemins démontre que si les nouvelles technologies peuvent amener de bonnes impulsions, elles ne sont pas pour autant une solution miracle. Mal utilisées, elles se révèlent même contre-productives.

Si certaines méthodes sont plus efficaces que d'autres, faut-il pour autant réduire la liberté pédagogique des enseignants ? Doit-on im­poser les pratiques agréées par l'autorité à tous ? Le livre répond par la négative. La confiance entre l'élève et l'enseignant prime en effet sur la technique. Si cette dernière amène un plus non négligeable, elle ne peut pas jouer un rôle positif si l'enseignant n'est pas à l'aise avec elle.

Ce tour d'horizon réalisé, Stevan Miljevic aborde la question de la formation des nouveaux enseignants. Là aussi, un large corpus scientifique est sollicité. En termes d'efficacité, il est plus pertinent d'apprendre à maîtriser des techniques efficaces que de laisser les nouveaux enseignants développer leurs propres outils, en « faisant prendre conscience », comme c'est souvent le cas actuellement. Des éléments précis de savoirs professionnels, tels que la manière dont doivent être gérés les comportements sont également apportés.

Enfin, l'ouvrage se termine par quelques considérations sur deux phénomènes médiatiques : l'école finlandaise et la pédagogie Montessori. Si la Finlande est régulièrement citée en exemple, son suc­cès doit se chercher en dehors des techniques pédagogiques utilisées (composition de la population, moyens investis pour les élèves les plus faibles, niveau de complexité de la langue...). Passé à la loupe, le test PISA révèle qu'avec l'essor des pédagogies progressistes, la Fin­lande est en fait en pleine régression ! Quant à la pédagogie Montessori, si elle fait incontestablement partie des meilleures pédagogies de type constructiviste, elle ne parvient pas à concurrencer l'enseigne­ment explicite.

 

Stevan Miljevic


Rien ne semblait destiner Stevan Miljevic à une carrière dans l'en­seignement : issu d'une famille d'entrepreneurs, il termine des études en Sciences politiques et en histoire à l'Université de Lausanne et se dirige ensuite vers l'économie privée, où il travaille pendant quelques années en tant que responsable administratif et financier.

C'est sur le tard qu'il décide de changer d'orientation et d'approcher le milieu éducatif : il obtient un diplôme d'enseignant pour les degrés du secondaire 1 et 2 à la Haute École Pédagogique du Valais. Passionné par les questions scolaires, il décroche aussi un diplôme de maître formateur et accompagne les nouveaux enseignants sur le terrain. Il enseigne actuellement les mathématiques, l'allemand, l'histoire, la géographie dans un cycle d'orientation valaisan (secondaire 1).

Parallèlement à son activité professionnelle, Stevan Miljevic est l'au­teur d'un blog polémique consacré aux grandes questions éducatives de notre temps. Le franc succès de cette plateforme le poussera à rédiger l'ouvrage présenté aujourd'hui.

Divorcé et père d'une petite fille, Stevan Miljevic consacre son temps libre à la recherche pédagogique, mais aussi à la lecture et à la pra­tique de différents sports.

 

Commentaire

(par Bernard Appy, 06.2019)

C’est en novembre 2013 que Stevan Miljevic et moi sommes entrés en contact. J’avais repéré son blog d’alors et la critique qu’il y faisait de la démarche constructiviste. Depuis nous échangeons régulièrement et en toute amitié.

Le livre qu’il a écrit et qui a été publié récemment, L’École à la croisée des chemins, fait le point sur tout ce que Stevan a appris sur son métier ces dernières années. L’intérêt de sa démarche est de ne pas rejeter a priori les idées constructivistes. Il les expose en montrant sa grande connaissance de ces pratiques par découverte.

Comment pourrait-on d’ailleurs les ignorer alors que toutes les formations, initiales ou continues, nous les présentent, en France comme en Suisse, de manière univoque depuis quarante ans ? Alors que la grande majorité des experts, des inspecteurs, des syndicats, des conseillers, des médias sont unanimes pour dire la grande qualité des pédagogies constructivistes et socioconstructivistes ? Tous les enseignants les connaissent et ont essayé, tant bien que mal, de les mettre en pratique avec les résultats décevants - pour ne pas dire plus ! - qui en résultent. Seuls quelques militants omniscients et omniprésents de ce courant pédagogique disent obtenir des résultats magnifiques avec leurs classes. Mais encore faudrait-il aller voir de plus près ce que cela donne vraiment. Au cours de ma carrière, il m’est arrivé de côtoyer quelques-uns de ces collègues férus de Freinet. Animé d’une saine curiosité professionnelle, je me suis alors intéressé de près à leur façon d’enseigner. Mal m’en a pris, car à chaque fois, j’y ai trouvé des classes agitées et bruyantes sous couvert de “classes actives”, des élèves ayant perdu tout sens de l’effort et n’ayant plus le moindre goût pour la réussite, sans aucun comportement adéquat pour travailler en classe, et n'ayant trop souvent aucune envie d’apprendre et de venir à l’école si ce n’est pour y planter une joyeuse pagaille.

Quant aux collègues “progressistes” de ces classes, quelques-uns se permettaient de donner des leçons à tous les autres instituteurs de l’école et de les culpabiliser en les traitant d’affreux passéistes incapables de comprendre ce qu’est l’École “moderne”. Ils aimaient tellement les élèves qu’ils les fuyaient en devenant très vite conseillers pédagogiques, tant leur chance était grande d’acquérir cette qualification puisque la cooptation est de règle dans la confrérie constructiviste. Les autres – la plupart – étaient des joyeux drilles qui avaient très vite compris que, moyennant un peu de bruit, il était moins fatigant de laisser les élèves « construire leurs savoirs » plutôt que de prendre la peine de leur enseigner quelque chose. Le tout, en étant dans le sens du vent pédagogique et en espérant ainsi obtenir l’assentiment d’une hiérarchie supposée acquise à la “découverte”... mais qui était rarement dupe des apprentissages réellement effectués dans ces classes.

Stevan Miljevic ne fait pas l’impasse sur le constructivisme pédagogique. Il dit ce qu’il faudrait faire en respectant strictement le dogme. Mais il ajoute aussitôt que l’efficacité de ce dogme n’a jamais été démontrée, bien au contraire. Dès lors, pour tâcher de trouver une solution professionnelle à leurs pratiques, les enseignants devraient recourir à la masse de données probantes, la plupart récentes, et aux enseignements, eux aussi récents et convergents, des sciences cognitives. Si on suit cette piste, une pratique se détache alors nettement, celle de l’Enseignement Explicite.

Pour chaque point abordé, la démonstration de Stevan Miljevic est imparable. D’où l’intérêt de mettre son livre dans les mains de tout enseignant, surtout ceux qui sont encore en formation, mais aussi les autres pour qu’ils y trouvent matière à réflexion puis, une fois convaincus, à argumentation.

Je voudrais également souligner le fait que les pratiques Explicites sont faciles à comprendre et encore plus à mettre en œuvre dans sa classe. Depuis que Françoise et moi diffusons et vulgarisons la Pédagogie Explicite, nous avons reçu de multiples témoignages d’enseignants, aussi bien du Primaire que du Secondaire, qui disaient leur surprise et leur extrême satisfaction de voir les élèves se mettre enfin au travail et obtenir des résultats grâce aux pratiques que nous exposions. Et ce, du jour au lendemain. Immédiatement…

Voici ce que dit Stevan Miljevic dans sa conclusion :

« Lorsque j’ai commencé à travailler (…), j’éprouvais des difficultés à tenir mes classes. (…) J’obtenais des résultats guère brillants. J’en ressortais épuisé, déçu de ne pas pouvoir remplir ma mission correctement. (…) Les théories qu’on m’avait présentées me paraissaient tellement contraires au bon sens que j’avais du mal à les appliquer. Lorsque j’essayais, je rencontrais à peu près systématiquement l’échec. (…) Un soir où j’effectuais une recherche sur Internet, je tombai un peu par hasard sur un texte écrit par les grands pontes francophones de l’Enseignement Explicite, les professeurs Gauthier, Bissonnette et Richard. (…) Intrigué, et parce que ce qu’ils préconisaient paraissait empreint de bon sens, je décidai de me lancer et de creuser le sujet. Ce fut pour moi un nouveau départ. (…) Ce que je constatai d’emblée parut encourageant. J’avais l’impression que le niveau montait et que les élèves commençaient à rendre de meilleurs travaux. (…) Plus ma maîtrise pédagogique s’affinait, plus je voyais son effet s’accentuer dans mes classes. À ma grande surprise, l’Enseignement Explicite n’agissait pas uniquement sur les apprentissages, mais aussi sur l’attitude des élèves. Mes cours devenaient de moins en moins agités. Les jeunes se montraient de plus en plus appliqués, concentrés sur ce que je leur transmettais. (…) Inlassablement, j’ai modifié mes approches et inventé de nouveaux dispositifs jusqu’au point culminant où j’ai doublé mon Enseignement Explicite d’une gestion de classe basée sur le soutien au comportement positif. Les effets sont devenus alors détonants. Les élèves atteignent un niveau dont je ne les aurais jamais crus capables auparavant. Ma vision du métier, comme celle des élèves, a radicalement changé. »

Merci Stevan pour ce témoignage.

Et pour la qualité de ce livre dont je recommande chaudement la lecture !

 
 
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